La rainette Hyla versicolor est connue depuis fort longtemps dans l'est de l'Amérique du nord. Pendant la période de reproduction, comme chez les grenouilles et les crapauds, la fécondation externe est permise par la formation des couples, la femelle rejoignant le mâle qui chante (fécondation externe car le mâle et la femelle libèrent leurs gamètes dans l'eau où ils se rencontrent). Et oui! Chez les grenouilles, c'est effectivement le ramage qui tient lieu de signal de reconnaissance entre individus. Notons au passage que dans l'espèce humaine, le ramage n'est pas ou plus le seul critère de reconnaissance sexuelle valant invitation à faire des galipettes.

En 1950, en étudiant le chant d'appel des mâles, on s'est aperçu que l'on pouvait distinguer parmi ces rainettes morphologiquement semblables, 2 catégories à répartition géographique différente qui chantaient donc un peu différemment (coa-coa et cooaa-cooaa par exemple).

Des croisements effectués en laboratoire, à partir des 2 populations, ont fourni des descendants généralement stériles. Nous notons à ce niveau de l'histoire que les grenouilles facilitent un peu le travail des gentils chercheurs qui veulent les marier. Du fait de la fécondation externe, c'est plus simple!

Comment expliquer cette stérilité de beaucoup de descendants? On a établi le caryotype de chacune des populations (le caryotype est la garniture chromosomique) et on a alors vu que l'une de ces populations était non pas diploïde mais tétraploïde pour un chromosome (normalement, la diploïdie est de règle).

Ainsi donc s'expliquait la différence de chant et la stérilité des descendants dont la garniture chromosomique était par trop anormale. Remarquons cependant que certains descendants n'étaient pas stériles: ceci peut s'expliquer par un mécanisme de régulation du nombre de chromosomes qui existe dans le noyau des cellules ; les chromosomes surnuméraires peuvent être éliminés. Sauf que cela ne marche pas toujours et bien et dans toutes les espèces (mais ce n'est qu'une hypothèse de ma part).

Cette histoire de grenouille illustre un processus appelé spéciation, ou création d'une nouvelle espèce. En effet, le début de l'histoire est le fait qu'une distance géographique a isolé deux sous-populations à partir d'une population ancestrale (migration des grenouilles... Plouc, plouc, plouc...). Plus de rencontres possibles, même si les mâles chantaient tous pareil et fort (Coa-coa, trop loin dirent les nénettes! Euh, les rainettes). Et voilà qu'un jour naît dans l'un des groupes un têtard doté de plus de chromosomes que les autres. Ce fut l'innovation génétique, là chromosomique. Enfin, y en eut-il un seul ou plusieurs? Toujours est-il que devenu grenouille, ce têtard ne fut pas stérile et même, on est bien obligé de l'admettre, il s'occupa de moult(e)s partenaires et engendra ainsi plein de petites rainettes avec plus de chromosomes et qui chantaient un peu différemment cooaa-cooaa. Mais comme tout le monde était au même endroit, dans la grande cacophonie que sont capables de produire des grenouilles en rut... les couacs sont passés inaperçus, enfin, inentendus, ou alors la subtile différence n'était pas une entrave à la reconnaissance.

Et cette innovation s'est répandue jusqu'à devenir la caractéristique de cette population: une nouvelle espèce née par le processus de spéciation introduit par l'isolement géographique.

Mais ! L'Est de l'Amérique du Nord... C'est de là que sont venus certains Coons !!! C'est trop !

© Cooncept - 2007.

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