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Par Odile

 

CMH: Derrière ces initiales se trouvent des cardiopathies se caractérisant par un épaississement du myocarde ou muscle cardiaque ventriculaire, Les 2 ventricules sont les cavités du coeur qui éjectent le sang dans les artères lors de leur contraction. La qualité de cette éjection est donc un facteur primordial de la qualité de la circulation sanguine dans l'organisme. d'où le terme de CardioMyopathie Hypertrophique. Les Coons, parmi les chats, n'ont pas le monopole de ces pathologies. Mais il se trouve que dans la race, l'incidence de l'une d'entre elles est relativement importante, ce qui a notamment initié une étude conduite par les Dr Kittleson et Meurs, avec caractérisation à l'appui du gène et de la mutation en cause.

Une forme de cette pathologie est donc anciennement connue chez les Coons. Elle a été caractérisée comme autosomale dominante. La dominance signifie qu'un seul allèle muté sur le couple d'allèle représentant le gène est suffisant pour que la pathologie se déclenche. Aujourd'hui, elle a pris le nom de CMH1.

On admet l'existence d'autres CMH du fait de la présence d'une telle pathologie, avec une forte suspicion héréditaire, chez des chats qui ne sont pas porteurs de la mutation CMH1. Les images échographiques cardiaques peuvent être ou non différentes. Il est soupçonné un mode de transmission autosomal dominant pour la plupart, voire toutes, ceci notamment par parallèle avec ce qui est observé chez l'Homme. A ce jour, l'existence d'une autre cause génétique au moins, chez le Maine Coon, est admise (la future "CMH2"): on attend des données plus précises sur ce sujet.

Lorsque la pathologie se déclare, l'épaississement du myocarde ventriculaire réduit peu à peu le volume de la cavité, donc le volume de sang que peut accepter ledit ventricule. Ceci peut provoquer une dilatation de l'oreillette du même côté car le sang "en trop" que le ventricule ne peut accueillir reflue vers elle. La valvule ne ferme plus hermétiquement la communication sous la pression du reflux sanguin. Ceci génère, dans certains cas, un "souffle cardiaque" à l'écoute, celui du reflux sanguin vers l'oreillette.

Mais il existe une assez large panoplie de symptômes divers qui traduisent la variabilité de l'expression de cette pathologie. En suivant ce lien, vous trouverez des informations sur les symptômes de la CMH (et son hérédité aussi).

L'échographie cardiaque valide par des mesures la forme exprimée.

La conséquence est le plus souvent la mort à plus ou moins longue échéance, notamment dans les cas les plus sévères. Elle peut être "brutale" par arrêt cardiaque. Elle peut être annoncée par d'autres symptômes: problèmes pulmonaires du type pneumonie liée à des œdèmes pulmonaires (cœur et poumons présentent des relations très intimes dans leur fonctionnement du fait de la circulation pulmonaire assurée par le cœur droit qui peut être perturbée); thromboses par le fait de caillots qui se forment notamment dans l'oreillette dilatée où le sang stagne...

Il n'y a pas de traitement miracle. Si la maladie a été détectée par une échographie cardiaque, il peut être prescrit l'aspirine pour limiter le risque de caillots donc de thrombose, et du diltiazem, molécule utilisée en médecine humaine, (reconditionnée afin d'adapter la posologie au chat). Il a un effet vasodilatateur qui améliore la circulation coronaire (intracardiaque) et abaisse la pression artérielle (l'hypertension artérielle peut être un des symptômes de l'hypertrophie ventriculaire). Il permet aussi de corriger une hausse de la fréquence cardiaque quand c'est le cas. Ceci permet donc globalement de "soulager" le cœur.

C'est donc une équipe américaine qui a repéré le marqueur génétique d'une forme dominante, la mutation MyBPC3, après une longue étude sur une colonie de Coons manifestant cette forme. Elle affecte un des multiples gènes codants pour des protéines constitutives de la fibre musculaire cardiaque, la protéine C cardiaque de liaison à la myosine (MYBPC pour myosin binding protein C en anglais).


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Un test de dépistage ADN a été mis au point par cette équipe. Il valide le fait qu'un chat soit porteur ou non de l'allèle muté qui est causatif de la pathologie. C'est déjà une superbe avancée dans ce domaine: compte-rendu des travaux de Kittleson et Meurs.

Il reste à expliquer le polymorphisme de cette pathologie : âge variable de manifestation, degré variable d'évolution et d'expression, symptômes variables. Ceci se traduit par l'obscure formule, apte à couvrir l'inexplicable: expressivité variable et à pénétration croissante avec l'âge, vraisemblablement incomplète.
Ceci suggère que ce gène voit son activité modulée par d'autres gènes et/ou d'autres facteurs (externes, épigénétiques...). Ainsi, il existerait un certain nombre "d'interrupteurs" ou de "potentiomètres" qui accélèrent ou retardent le réveil du gène ainsi que l'intensité de son expression. Ils ne sont pas actuellement cernés. En ce sens, cette CMH nous amène à considérer l'évolution des idées qui a eu lieu depuis l'étape fondamentale que fut la génétique mendélienne. Dans de nombreux cas, une pathologie, un caractère, ne sont plus strictement monogéniques (liés à l'expression d'un seul gène) mais bien plus souvent le résultat d'interactions entre plusieurs gènes et d'autres facteurs. Il n'en reste pas moins que le fait causatif N° 1 de la pathologie est la présence de l'allèle muté pathogène. Les autres facteurs restent secondaires et non maîtrisables aujourd'hui.

Une CMH a donc vu arriver l'heure de sa caractérisation, et c'est déjà une victoire. Une seconde pour demain? Combien d'autres mutations causatives? Combien de formes congénitales et non pas héritées? Les Coons sont là à la même enseigne que les humains, avec l'espoir de découvrir demain d'autres causes et des traitements.

Ce dont nous disposons aujourd'hui pour limiter l'incidence de la CMH? Un test ADN qui dépiste une mutation causative dominante et un suivi des reproducteurs par échographie cardiaque. Leur utilisation raisonnée doit permettre de réduire la transmission de cette forme connue et de grossir les connaissances sur les autres formes.

Il reste à être clair sur la place des examens actuels disponibles:

L'échographie cardiaque n'a aucune valeur de pronostic quant à la santé cardiaque future d'un chat. Elle n'a valeur que de diagnostic au moment où elle est pratiquée. Ceci pour dire qu'elle n'offre aucune garantie quand elle est pratiquée seule. Elle ne peut indiquer que l'état du coeur au moment où est pratiqué l'examen: il est exempt ou il manifeste les symptômes d'une CMH. Elle garde par contre toute sa valeur dans le suivi des chats qui ne sont pas porteurs de la mutation MyBPC3, afin de dépister des CMH ayant d'autres causes.

Le test ADN permet d'avoir une certitude: celle que tout chat qui a la mutation, qu'elle soit à l'état homozygote ou hétérozygote, est un chat qui développera tôt ou tard la pathologie, du moins dans la majorité des cas.

Il en résulte que le test ADN a une toute autre valeur et place que l'échographie. Ils sont nombreux aujourd'hui, les Coons dépistés génétiquement "CMH1 hétérozygote" qui avaient ou ont encore un "beau cœur" à l'échographie. Ceux qui "avaient" sont partis. A un an, à deux ans ou plus tard. On espère que ce sera le plus tard et le moins douloureusement possible pour les autres...

Il est donc essentiel de ne pas nier ce qui est clairement prouvé, au profit d'une utilisation hasardeuse de ce qui reste hypothétique.

Il se pourrait que les hétérozygotes expriment moins tôt et moins fort... Sauf que certains chats hétérozygotes ont déclenché la pathologie tôt, avec évolution rapide et mort à la clé tout aussi rapide. Certains dont les parents sont d'ailleurs toujours vivants...

Il se pourrait que des facteurs externes protègent quand d'autres facilitent... Sauf que 2 parents toujours vivants, donc "protégés", ont générés des bébés pas vraiment protégés...

Il se pourrait que d'autres gènes hérités, polygènes "protecteurs", expliquent que la pathologie se déclare tardivement dans certaines lignées... Sauf qu'on ne sait ni combien ni qui ils sont...

Il se pourrait même que demain, des facteurs épigénétiques, héritables eux-aussi en partie, expliquent cette expressivité variable... Là encore, c'est... Pour demain...

... Cela fait beaucoup de conditionnels ! Le conditionnel rassure. Le fait scientifique prouvé, non.

Ce siècle s'ouvre sur des découvertes quant à la cause génétique de base de certaines pathologies lourdes. Même s'il reste plein d'inconnues quant à ce qui contrôle l'expression des gènes, il faut aujourd'hui en élevage faire des choix sur la base de ce qui est prouvé et non de ce qui ne l'est pas.

L'exemple de la CMH1 chez les Coons doit servir un pan de la culture et des valeurs indispensables à l'élevage. Elever, n'est-ce pas accepter d'être le garant de l'amélioration d'une race et non pas de son appauvrissement? Même si le prix à payer paraît lourd, est-ce aux éleveurs de le payer ou aux Coons?

Il est donc essentiel de ne pas faire de raccourcis interprétatifs de ce que le suivi actuel possible renseigne. En ce sens, les éleveurs respectueux de ce qu'ils gèrent et font naître, la vie, ne peuvent et doivent pas se conduire comme des marchands de voitures: la mécanique de la vie ne peut malheureusement pas se réclamer d'une garantie décennale ni même d'un contrôle technique tous les quatre ans.

Tout ce que l'on peut et doit garantir est qu'on tente de faire le meilleur et d'éviter le pire...

Le mot d'Elisabeth

J'ai choisi ma première Maine Coon en 1994, elle est arrivée chez moi en février 1995. Cette ancienneté dans l'élevage joue très certainement sur ma position quant à la HCM et je comprends que des gens qui commencent aujourd'hui à élever aient une position plus intransigeante que la mienne.

Les chats que j'achète aujourd'hui sont tous négatifs au test ADN, mais si j'ai stérilisé presque tous mes chats hétérozygotes, je n'ai gardé "entière" qu'une chatte à laquelle je suis profondément attachée et qui est l'image presque parfaite des coons que je souhaite voir naître chez moi. Je la marie cette année avec un mâle négatif, afin de garder une chatte, également négative, pour donner à mon élevage l'inflexion vers ce type que j'aime. S'il n'y a pas de femelle négative dans la portée à venir, je recommencerai le mariage.

J'ai la possibilité de faire un croisement sans doute plus intéressant, du point de vue des lignées, avec un autre mâle, lui aussi hétérozygote. Je ne le ferai pas car je ne souhaite pas faire naître de chatons homozygotes, considérant que le risque de déclenchement de la maladie est trop important et que le prix à payer est bien trop grand. Le type ou la vie? Mon choix est fait, c'est la vie, et tant pis pour ma gloriole d'éleveur.

Pour résumer, je considère qu'à moyen terme il ne devra plus y avoir en élevage de chats porteurs. En attendant, mes chatons hétérozygotes sont vendus en compagnie, déjà stérilisés, même si c'est parfois à regret, et je ne cède en reproduction que les chatons négatifs.

Le mot de Catherine (MS)

En 2003, quand j'ai voulu acquérir mon premier Maine Coon, on commençait à parler de l'HCM en France. Ou, devrais-je dire, on ne parlait soudain que de ça et le débat faisait rage sur les forums où je venais à la pêche aux infos ! Je n'avais alors pas la moindre idée de ce que cet acronyme pouvait bien signifier…

… mais il en eût fallu davantage pour me dissuader d'avoir mon rêve de chaton & chaton rêvé !

… ça a simplement pris plus de temps que prévu !!! Le temps que je lise tout ce que je pouvais lire -de sérieux- sur cette pathologie… et, une idée en amenant finalement une autre, que j'apprenne à lire un pedigree et à repérer lesdits "chats à risque" dessus (non pas que je cherchais à ce qu'il n'y en eût aucun - je compris vite, que, sur 6 générations, un historique de "zéro problème de quel qu'ordre qu'il soit" sur ces 126 ascendants signifiait en fait: "on n'a pas d'information sur ce pedigree", car la vie et le vivant sont ainsi faits)… et, finalement, que je trouve une éleveuse en qui j'aie confiance, et dont j'aime les pedigrees et la démarche. Ce ne fut pas celle qui me dit : "Mes lignées sont totalement exemptes d'HCM, je peux vous l'assurer", mais celle qui parla ouvertement et simplement de son chat décédé d'HCM, et présenta les tests échocardiographiques des parents de mon futur chaton en les relativisant à leur âge. Mmmmh! Que je suis bizarre… ou pas tant que ça!

Je tiens à dire qu'à aucun moment "l'existence" de l'HCM ne m'a détournée de mon projet d'adoption d'un Maine Coon… car il ne m'a pas fallu longtemps pour découvrir qu'il s'agissait de la maladie héréditaire la plus fréquente chez le chat - gouttière compris, donc - et qu'on la retrouvait, par exemple, dans d'autres races. Le fait que les éleveurs de Maine Coon en parlent dans l'ensemble assez facilement, le fait qu'il existe des programmes de santé pour l'endiguer, etc. m'a plutôt donné confiance. Mmmmmh! Que je suis bizarre… ou pas tant que ça!

Et puis… mon petit Coon est arrivé à la maison (enfin!)… Entre le "linechasing" qui me manquait déjà et la bouille & les bêtises de mon bébé qui me faisait pousser pleins de "gniiiii il est trop-trop-mignon" dès que je le regardais, j'ai bien fini par admettre que j'avais mis le doigt dans un certain engrenage…

… qui s'est concrétisé, en décembre 2005, par la réservation de ma première Maine Coon de reproduction. Oui, en décembre 2005… genre 15 jours avant que l'annonce de la mise à disponibilité du test ADN pour la mutation HCM1 ait été faite - ce qui m'a coûté un décalage de billet d'avion le temps d'avoir ses résultats et une pénurie d'ongles à ronger…. :-D

Je fais partie de ces p'tits jeunots dans l'élevage qu'Elisabeth peut qualifier, avec raison, de plus intransigeants.
Il fut entendu avec l'éleveuse de ma Coonette que, si elle s'avérait porteuse de cette mutation, je ne la prendrais pas (une idée qui me faisait littéralement pleurer rien qu'à l'effleurer, mais c'était décidé). Quand on commence, on a le devoir de le faire avec les meilleurs chats possibles. Et puis… de qui me serais-je moquée? Quand on commence, on n'a rien fait… Je n'aurais pas pu le justifier par rapport à un "travail effectué sur les lignées" par définition inexistant, je n'aurais pas pu le justifier par rapport à la population, les parents étant encore entiers et en âge de reproduire s'il s'agissait d'aventure de sauvegarder leur patrimoine génétique et, surtout, je n'aurais pas pu justifier aux futurs acquéreurs des chatons (ma première portée!) d'avoir sciemment exposé leur chaton au risque de développer une HCM. Bref, je n'aurais pas pu le justifier… A dire vrai, dans ma configuration, la question ne s'est jamais posée ; c'était littéralement hors de question.

Choisir de commencer en plein dans la "tourmente MyBPC3", ce n'est pas forcément de tout repos… mais rétrospectivement -déjà- je me dis que c'était quelque part la meilleure… Avoir droit à seulement deux semaines pour s'émerveiller d'avoir réservé la Coonette de ses rêves niveau pedigree et couleur, rêver à pleins de jolis chatons Coons et projeter des mariages, pour voir tout cela potentiellement s'écrouler et devoir éventuellement tout redéfinir… ça calme! Ca apprend aussi… en élevage, on peut voir "tout s'effondrer" à tout moment. C'est le privilège d'avoir la responsabilité de faire naître des êtres vivants.

Quand j'ai imprimé les feuilles de résultat négatif de mes deux Maine Coons pour la mutation HCM1, je me suis assise pour bien mesurer ma chance.
C'est qu'en parallèle, les premières estimations sur la prévalence de celle-ci étaient communiquées par les laboratoires. Et, aussi, on se rendait compte que son expression est si variable qu'elle se retrouvait chez des chats testés par échographie, et dont des ascendants l'étaient également. Double coup de massue!
C'est le moment où "tout est devenu compliqué"… Pour une mutation dominante, le principe de base est de ne pas faire reproduire les individus qui en sont porteurs. Pour une mutation ayant une forte prévalence, le souci est d'éviter un goulot d'étranglement dans la population… Deux principes inconciliables par nature, sources de recommandations divergentes des instances vétérinaires, et ce de manière absolument indépassable…
Je comprends ceux qui œuvrent à préserver la diversité génétique de la race et se résolvent à faire reproduire un hétérozygote (enfin… quand c'est pour cette raison là!), et il en est parmi eux que je respecte, pour certains beaucoup. Mais ceux qui ont su reconnaître, objectivement, que, vis-à-vis de la race, leurs pedigrees ne représentaient pas, humblement, un "réservoir de variation" et ont centré leur décision sur leurs chats en tant qu'individus, sans vouloir assumer le risque de faire naître en le sachant un chaton porteur, qui, potentiellement, développerait la maladie, pour choisir de stériliser leur(s) chat(s) -parfois tous leurs chats- ont mon estime. Ce n'est pas grand-chose, et même rien, mais c'est tout ce que j'ai de mieux à offrir…

Pour finir…

… une note de réalisme - sur ma chance! Tout "linechasing", toutes observations phénotypiques (comme le sont les échographies) ont leurs limites… que peuvent venir sanctionner -durement- un génotypage, quand il arrive. J'ai eu de la chance, car, finalement, "c'est pas passé loin". En aurai-je toujours autant? Je sais d'avance que non - sur ça, ou sur autre chose. C'est ainsi.

… une note d'optimisme - Aujourd'hui, nos chats bénéficient des avancées de la génomique à un rythme qui est vertigineusement rapide (si l'on considère qu'il y a quelques années à peine l'identification d'une telle mutation était un "horizon d'espoir quasi inespéré"), même s'il est frustrant quand il amène, avec une réponse, autant de questions nouvelles (… et quand on sait qu'il y a au moins une autre cause d'HCM chez le Maine Coon, on aimerait avoir "une machine à faire avancer le temps de la recherche").
Pour cette cause d'HCM au moins, on a aujourd'hui un moyen qui nous permet de sérieusement endiguer l'incidence de cette maladie terrible. Malgré tout, malgré sa prévalence coup de massue, malgré les larmes versées pour les résultats de chats aimés, je n'arrive pas à cesser de me réjouir comme le jour de l'annonce de la mise à disposition de ce test.
Et parce que je suis vraiment très optimiste, et d'une bonne humeur à toute épreuve qui donne parfois envie de me gifler, je ne peux m'empêcher de penser que cet épisode confirme qu'aujourd'hui, on ne peut faire l'économie, après l'apprentissage de la "génétique des couleurs", de notions de génétique des populations. Non seulement elle est la seule justification sous-tendant les recommandations "préventives de goulot", mais elle vient expliquer la prévalence si élevée de cette mutation… mais aussi donner des idées pour que "plus jamais ça". Comme l'écrit Ulrika dans une phrase qui me fait rire-et-pleurer à la fois: Faire de l'élevage avec des effectifs efficaces trop faibles tout en mettant en place des projets pour lutter contre les pathologies génétiques à l'intérieur de la race, c'est comme suivre un traitement contre le cancer et continuer à fumer. Ou bien écoper et essuyer l'eau qui a débordé d'une baignoire sans avoir pensé à fermer le robinet: l'eau continue à couler dans la baignoire (Chercher à éviter les pathologies en élevage - sur Pawpeds).

… une note de reconnaissance - pour les particuliers. Pour ceux qui, quoiqu'informés sur les risques encourus, acceptent d'adopter un chaton hétérozygote… participant ainsi, lors même que ce n'est pas leur rôle, à "l'élimination" de cette tare. En toute franchise, je ne le ferais pas, je ne l'aurais pas fait. Nous avons tous des relations différentes au vivant et aux "risques inhérents à la vie" - en voici un que je ne prendrais pas (parce que connu - les inconnus, je les accepte de fait...). Mais je me dis qu'il faut saluer l'amour du Maine Coon que témoignent les gens qui accueillent ces chatons.

Là où il ne s'agit plus de note, mais de profonde compassion, c'est pour ceux qui ont perdu un chat à cause de l'HCM. Si j'ai de la chance, j'ai aussi vu des malheurs autour de moi… petit Lulu, tendre Velvet, je pense à vous. Souvent.

Et puis… si, aujourd'hui, on ne peut plus passer à côté de la question de l'HCM à moins d'élever dans une grotte du Larzac, on devrait garder en mémoire et tirer beaucoup d'humilité du fait qu'au départ, il y a 15 ans maintenant, la recherche sur l'HCM chez le Maine Coon n'a pas démarré suite à une réaction des éleveurs, mais à l'obstination d'une particulière… Sans elle, on ne serait pas là aujourd'hui en termes de connaissances.
Alors, pour la mémoire de Golden Girl, pour moi, chez moi, il a été impossible de seulement envisager de faire reproduire un porteur d'HCM1… j'aurais eu le sentiment qu'elle était morte pour rien.

Le mot d'Odile

Mon élevage s'appelle Anatolê. Cela signifie l'aurore, plus précisément ce moment où le soleil monte à l'horizon (ana c'est la montée, tolê, c'est le soleil). Cela pour dire que l'aurore s'est transformée en crépuscule...

Oh, j'ai été "formatée" bien avant la reconnaissance de la CMH1 quant aux aléas dramatiques possibles de l'élevage. J'ai commencé par le vilain virus vraiment très virulent... Comme le dit en substance Heather Lorimer, il y a un facteur chance dans l'élevage, lequel n'a pas daigné frapper à la porte d'Anatolê. Ceci pour introduire mes considérations quant à cette question...

J'ai fait tester tous mes Coons début 2006, avec un choix déjà déterminé de retirer de reproduction tout chat porteur de la mutation. De par ma formation autant que par ce que j'ai décidé de faire en élevage (et l'un déterminant l'autre), il n'est pas question pour moi de transmettre un allèle morbide, qu'il soit dominant ou récessif, alors même que le diagnostic est posé. Tout comme je refuse de le faire si un doute est vraiment posé. Tout comme pour une infection virale grave, j'ai décidé par le passé de pratiquer le vide sanitaire nécessaire.

Quand les résultats sont arrivés, je les ai lus les uns aprè les autres comme en état second. Et puis j'ai pleuré pour mes het+ comme pour mes het-. Pas pour l'élevage, pas pour moi, pour eux. Car pour eux, c'était l'épée qui se calait sur chacune de ces têtes chéries : Quand ? Comment ?

Alors j'ai fait selon mon choix initial. Tous ont été castrés. Les plus jeunes (moins d'un an) ont rejoint une famille d'adoption, informée. Les plus anciens devaient rester avec moi.Ils sont avec moi.

Je n'ai pas envisagé un mariage het+ avec un sain : Je n'avais d'ailleurs aucun chat "sain" en dehors d'Archie, fils de Lulu, déjà castré. Et ceci explique en partie cela. Lulu, c'est mon enfant chat. Et lulu était sain CMH1 mais dépisté CMH à l'échographie et condamné à brêve échéance. J'ai refusé l'idée de faire naître des chatons hétérozygotes comme j'ai refusé l'idée de tenter encore le sort avec le bel Archie. Aucun chat, aussi beau soit-il, ne peut pour moi être une raison de faire naître des porteurs d'une tare génétique.

J'entend ceux qui disent vouloir préserver la diversité allélique de la race : Ceci n'a aucune résonnance pour moi car cette diversité brandie comme argument n'est que de l'homogénéité, beaucoup d'homozygotie liée à la consanguinité qui a fortement présidé à la plupart des chats actuels issus de vieilles lignées.

J'entend ceux qui disent simplement vouloir préserver une lignée, un look, une image qui leur tient à coeur en faisant des derniers mariages raisonnés.

J'entend tout ce qu'il y a d'autre derrière, quand on est dans l'élevage : Les heures, les jours et les années, un peu de gloire quelquefois, beaucoup d'argent toujours...

Je ne juge pas, je ne juge plus. Je dis simplement qu'aucun de ces arguments n'est mien.

Et parce que j'ai vu mourir de CMH ma belle louve et mon enfant chat, qui n'ont pas eu la dernière chance de partir vite, d'un coup d'un seul, j'ai choisi de mettre fin à une page d'élevage, sans regret aucun.

Qui peut se satisfaire de ne pouvoir qu'accompagner et abréger leurs souffrances ?

Je referais aujourd'hui ce que j'ai fait hier. Parce que je reste persuadée qu'en élevage, il faut être impitoyable quelquefois et toujours, avec soi-même et pour ceux qu'on élève. Il faut admettre et accepter la Science en limites, temps et heure, car nous n'avons pas le temps, pour eux, d'attendre demain.

On sacrifie des images. Ce ne sont que nos images d'humains. Ne sacrifions pas nos Coons.

P'tits gènes

Traduction d'une interview de M. Kittleson

© Cooncept - 2007.